
L'ingénieure dont le profil a été supprimé parce que "trop beau pour être vrai"
Vous vous en souvenez peut-être: en 2013, le réseau social LinkedIn avait supprimé le profil d'une jeune femme développeuse web, parce qu'il avait jugé ses photos "trop belles pour être vraies". La développeuse y portait un haut noir à manches longues, non décolleté, les cheveux en partie attachés et un maquillage léger. Mais elle y figurait "souriante" dans une pose "suggestive" avait précisé un porte parole. En fait de pose suggestive, elle avait la tête un peu penchée et on voyait - oh mon Dieu - un bout de son épaule.
Cette suppression avait immédiatement été considérée comme sexiste, notamment par le site Les Nouvelles News, qui écrivait qu'il s'agissait là de sexisme ordinaire, quotidien, qui consiste en l'exigence que les femmes "baissent les yeux". On ne supprimerait jamais le profil d'un homme pour une raison identitque, et ce procédé remet en question la crédibilité même d'une femme ingénieure, puisqu'on ne lui a pas demandé de "changer sa photo" mais bien de "la supprimer" arguant qu'elle ne pouvait qu'être fausse.
Dernièrement, une étude menée par l'Universite de l'Oregon a révélé que les femmes "sexy sur Facebook" étaient jugées incompétentes. Un panel à qui l'on a présenté deux types de profils, un avec une femme dans une pose neutre et vêtue sobrement; et l'autre avec une femme en action, souriante, vêtue d'une robe rouge, a jugée "plus qualifiée" le profil de la femme "non sexy".
Bien sûr, on pourrait remettre en question le qualificatif "sexy", puisque ce qui sera sexy pour un ne le sera pas forcément pour l'autre. Mais plus que les résultats de cette étude, l'analyse des commentaires qui lui sont associés sont criants de sexisme eux-mêmes.
Ainsi, certains consultants RH en profitent ils pour conseiller de mettre "une photo où l'on ne sourie pas" car qui dit sourire dit temps libre, esprit libre, et donc peu de travail. Il vaudrait mieux donc, afficher une photo de soi occupé, sourcils froncés, ride du lion en avant, dossiers sous le bras, voir téléphone sur l'épaule ou kit mains libres en action afin d'envoyer le message "je suis compétente".
Conseils qui bien sûr ne s'appliquent pas à un homme, car un homme en tenue décontractée sur Facebook sera perçu comme "rigolo", "distancié", "pas prise de tête", "équilibré", "sachant faire la part des choses".
Cette étude ne vient que confirmer des pratiques qui ont malheureusement court depuis des lustres: nous pensons à Lynda Oddes, virée pour cause de "trop grosse poitrine"... ou Melissa Nelson, renvoyée parce que "trop sexy, elle devenait une menace pour mon mariage, j'étais trop tenté.." avait expliqué son patron, dentiste.
Laura Fernee, une chercheuse en médecine, a elle, carrément décidé d'arrêter de travailler ! "Toutes mes collègues me prenaient pour une bimbo ou pour une fainéante, alors que j'en faisais trois fois plus qu'elles" se plaint-elle.
D'ailleurs, même moi qui ne suis pas spécialement belle, on m'a déjà dit dans un shooting "pas trop sexy, c'est pour des mères de familles !" comme si les mères allaient forcément présumer de l'intérêt ou du désintérêt à porter à une autre femme selon son attidude physique !
Souvenez-vous encore de l'affaire Debrahlee Lorenzana. Cette banquière avait purement et simplement été renvoyée parce que "trop sexy": on considérait qu'elle déconcentrait ses collègues !
Ce qui est méprisant à double titre: pour elle évidemment, mais aussi pour ses collègues masculins qui sont donc présumés être d'horribles bêtes d'hormones incapables de travailler si une femme avec deux jambes se trouve dans la même pièce qu'eux, ce qui vous en conviendrez, n'est pas non plus très flatteur pour ces messieurs...

Debrahlee Lorenzana, la banquière renvoyée pour "être trop sexy"
A aucun moment, on ne lui reproche un COMPORTEMENT. On lui reproche un ETAT. Ou même pire, on lui reproche ce que ce que l'appréciation de ce qu'elle est ("Je vous trouve sexy") cause sur d'autres personnes ("Je vous trouve sexy et je pense que les autres aussi vous trouvent sexy, et que ça les perturbe".)
Finalement, derrière le "sexy" il y a donc le "une femme". Car on tolérerait Lorenzana et les autres au travail si elles étaient vêtues en hommes. C'est donc le signe ostentatoire de féminité qui dérange.
Être sexy.
Avoir des enfants.
Tout ce qui montre, tout ce qui ne cache pas le genre féminin.
A l'inverse bien sûr, une femme vêtue d'un costume cravate serait jugée "travestie"; et une femme aux cheveux courts "trop masculine", on évite le débat sur une femme en voile ? Bref, finalement, derrière le problème "femme trop sexy" il y a le problème "femme". J'ai eu beau chercher, je n'ai trouvé aucun cas de jurisprudence faisant mention d'un homme "trop beau" ou "trop sexy" pour travailler.
Il faudrait, pour travailler, réussir à faire oublier que l'on est une femme ?